OGM

Quelques réflexions sur un débat génétiquement malaisé

ADNMercredi, j’ai expliqué pourquoi j’étais contre les OGM dans une émission scientifique. A vrai dire, je me sentais un peu comme Daniel jeté dans la cage aux lions. Je réagissais à une interview de Marc Robinson-Rechiavi, professeur à l’université de Lausanne et pro-OGM convaincu, alors que la génétique n’est pas mon domaine de compétence.

Comme un des principaux reproche du dit professeur était que les anti-OGM sont irrationnels et anti-science, j’ai donc étayé mon argumentation et soigneusement élagué tout propos dont la référence pouvait être soupçonnée d’écologisme. Mais je m’attendais à une puissante volée de bois vert sur les bases scientifiques de mon argumentation. Or, ce n’est pas exactement ce qui s’est passé.

A mon grand étonnement, c’est avant la diffusion de l’émission que les feux ont été ouvert. En effet, ma participation a été annoncée sur twitter et un autre professeur de l’université de Lausanne est intervenu d’un manière peu amène:

Bientôt suivi par un professeur honoraire de la même institution:

Ces messages ont été écrit avant la diffusion de l’émission. Ces messieurs n’avaient donc pas pris connaissance de mes arguments avant de critiquer ma position. Autrement dit, ils ont fait exactement ce qu’ils reprochent aux anti-OGM: de l’idéologie.

Mais cet événement m’a poussé à m’interroger sur le débat assez stériles sur les OGM. En effet, on a l’impression d’un dialogue de sourds dont probablement les deux parties sont responsables. Du côté des pro-OGM, on accuse les anti-OGM d’être des conspirationnistes et de n’y rien comprendre à la science.Du côté des anti-OGM, on accuse volontiers les pro-OGM d’être à la solde des grands groupes semenciers.

Les deux accusations ne sont pas exactes. Il y a des scientifiques parmi les anti-OGM et il existe aussi une recherche OGM indépendante de Monsanto et autres.

Mais surtout, il me semble que les deux camps ne sont pas toujours sur le même terrain de discussion. En effet, les pro-OGM et anti-OGM avancent des arguments scientifiques, économiques et sociaux. Mais quand les anti-OGM avancent des arguments des considérations éthiques, les pro-OGM les taxent d’obscurantistes.

Or, nous savons tous que nous prenons des décisions politiques, non seulement sur la base de ce que nous dit la science, mais plus encore sur la base de nos valeurs (philosophiques, religieuses). Et le débat sur les OGM n’échappe pas à la règle.

La question éthique peut se résumer ainsi “Jusqu’où l’être humain peut-il modifier la nature?”. J’entends déjà ceux qui se demanderont pourquoi est-ce qu’il faut mettre une limite ou qui argueront que nous avons déjà tellement modifié la nature que ça ne changerait pas grand chose.

Je pense qu’ils ont torts, parce que nous avons tous une limite à l’intervention humaine. Imaginons que nous devions voter sur l’eugénisme, p.e. sur la possibilité donnée aux parents de modifier le génome de leur futur enfant pour choisir la couleur des yeux, la taille, etc. Seriez-vous d’accord? D’un point de vue purement scientifique, c’est exactement la même technique que de fabriquer un OGM, il n’y a pas de différence. Mais je suis convaincu que les pro-OGM ne seraient pas en faveur d’une telle possibilité (appel à volontaire!). Et si j’ai raison, ça signifie qu’ils mettent bien une limite éthique à l’intervention humaine.

Dès lors, la question éthique en ce qui concerne les OGM est tout à fait légitime. Si on ne peut pas intervenir sur le génome des humains pour notre confort, pouvons-nous le faire pour les animaux? Pouvons-nous le faire pour les plantes?

Je n’ai pas de réponse définitive à ces questions. Mais je sais une chose: aussi longtemps que les pro-OGM n’aborderont pas les questions éthiques, ils seront toujours perdants.